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Qwant: "On ne peut pas vendre les données de santé de ses utilisateurs!"

Début de cette année, l'appli de rencontres pour la communauté Gay et Lesbien Grindr a communiqué à des entreprises partenaires l’e-mail, le téléphone, les données de géolocalisation (une des raisons du succès de Grindr qui permet de rentrer en contact avec les membres les plus proches) et le statut VIH de ses utilisateurs. Explication de l’éditeur: cela figure clairement dans ses conditions d’utilisation. Si les utilisateurs décident d’intégrer ces données dans leur profil, elles deviennent publiques. En Europe, les données sensibles sont protégées mais la tentation est grande pour les exploitants Big data de faire feu de tout bois pour capitaliser sur ce nouvel or noir qu’est la donnée. Pourtant, des alternatives existent. Pour la première fois en Europe, un moteur de recherche grignote des parts de marché à Google.

 

Je me fiche de savoir si vous êtes hétéro ou gay

Eric Leandri, le fondateur de Qwant, était de passage à Namur Expo à l’occasion de l’événement Shake Digital Wallonia du 6 décembre. "Moi, je respecte votre vie privée. Je me fiche de savoir si vous êtes de gauche ou de droite, hétéro ou gay. Je vous donne simplement les résultats de l’Internet et du Web social. Comment je gagne ma vie? Supposons que vous cherchiez un iPhone. Vous tapez le nom du modèle qui vous intéresse, il s’affiche dans différents espaces shopping. Vous cliquez sur l’un d’entre eux et, miracle, l’e-commerçant me reverse de l’argent."

 

On n’a pas besoin de vous connaître pour faire de l’argent

Pour vous vendre une robe, je n’ai pas besoin de savoir si vous êtes un homme ou une femme. J’ai simplement besoin de comprendre votre question. On n’a pas besoin de savoir qui vous êtes pour faire de l’argent. Google, c’est aujourd’hui 100 milliards par an. A 80%, c’est le même business que moi. On s’est juste coupé des 20% issus de la vente des données à des tiers. 20% ce n’est pas grand-chose mais la différence est ailleurs. Aujourd’hui, Google vaut 700 milliards de dollars en bourse. Pourquoi autant? Parce qu’il sait ce que vous faites avec vos voitures, parce ce qu’il va être capable de vous traquer absolument partout et de vous vendre le petit truc que vous aimez d’habitude. Et si vous aimez la glace à la pistache et si dans votre enfance vous avec aimé la glace au citron vert, vous n’en reverrez jamais la couleur car il vous enfermera dans vos goûts actuels et vous gavera de glaces à la pistache. Ce que nous voulons, c’est juste vous donner les résultats de l’internet, du web complet et du web social et pas juste le truc qu’on sait que vous allez cliquer. On vous respecte et on respecte vos données."

 

On prend des points à Google

Reste qu’avec moins de 1% des recettes dans le monde, Qwant ne pèse pas très lourd face aux 63% de Google. Pour Leandri, tout dépend du point de vue où l’on se place. «Nous connaissons une croissance de notre chiffre d’affaires de 15 % par mois. Qwant accueille 100 millions de visiteurs unique par mois. On traite de l’ordre de 15 à 18 milliares de requêtes par an. Alors oui, on fait office de petit poucet mais depuis une dizaine d’années, personne n’avait fait reculer Google en Europe. On lui a pris 5 points en France, 2 en Allemagne, 1 en Italie. Et je vais arriver sur la Belgique début de l’année prochaine. J’ai fait basculer Paris, j’ai fait basculer l’île de France et le sud de la France. Nous avons des boîtes énormes comme Thales ou Safran, des consulats, des ambassades, des geeks, des hackers et des CIO qui basculent sur Qwant par millions. En France, nous sommes le moteur numéro 1 pour la tranche des 6-12, avec 67 % de parts de marché. Qwant Junior filtre les contenus adultes et violents. Si vous tapez Nigeria ou Syrie, vous avez le Nigeria ou la Syrie. Après une attaque terroriste à Paris, si vous tapez Paris, vous avez la Tour Eiffel."

 

Ne pas ouvrir les vannes des données de santé des citoyens.

"Ce qui est en train de se passer, c’est que les gens sont en train de se rendre compte qu’ils ont le droit d’avoir le choix. Il n’y a pas que Google et les Gafa. L’Europe compte des fleurons industriels. On nous dit que d’ici 2021, on va devoir choisir entre le Web américain ou le Web chinois. Non, nous avons le droit à un Web européen. Nous avons droit à des alternatives, à du Wikipedia, à de l’Open Source. Je demande juste de pouvoir résister . Vous avez le droit de ne pas être traqué en permanence. En Europe, nous avons les meilleures données de santé du monde. Nous avons la capacité de les traiter et de les exploiter pour le mieux des citoyens et en faisant du chiffre d’affaires, sans les vendre au tout venant. On peut faire de l’Intelligence Artificelle et du Big Data avec des valeurs. C’est une question de souveraineté numérique européenne."

 

Illustration : ©Gilles Lemoine

 

Tags : Open Source